Chaman d'un nouveau temps

Petite réflexion sur le monde du chamanisme et sur la fonction du chaman. Comme l’a bien défini Michael Harner, anthropologue américain spécialiste du chamanisme, le chaman dans les sociétés traditionnelles, est tout à la fois sage, thérapeute, conseiller, guérisseur et voyant. Mais aujourd’hui, au moment où le chamanisme se répand de plus en plus, le chaman a-t-il toujours la même fonction ? Doit-il aussi toujours être le porteur de traditions de sa tribu ? Peut-on employer le terme de chaman pour des personnes n’étant pas de lignée chamanique familiale ?

Ayant été reconnue comme chamane par un chaman sibérien, qui lui-même n’est pas d’une famille de chaman mais a un engagement total, le sujet m’interroge forcément beaucoup. Un jour, un ami m’a fait une réflexion que j’ai trouvé fort judicieuse. « Si j’ai bien compris, avant il y avait un chaman par tribu, alors vu que l’on est très nombreux maintenant, peut-être qu’il en faut beaucoup plus et qu’il n’est plus possible qu’ils viennent uniquement des grandes lignées chamaniques ? » Réflexion bien intéressante. Et finalement, le chaman prenant part à quasi toutes les affaires de la tribu auparavant, il est peut-être même nécessaire d’avoir des chamans dans différentes sphères de la société et pas seulement dans les cabinets de thérapie.

Même si d’un point de vue humain, on dit que le don se transmet de manière héréditaire, finalement au niveau de l’âme rien n’est moins sûr. Un jour, lors d’une séance, le message m’est venu qu’un chaman est un pilier de lumière, c’est à dire que le chaman serait une âme qui accepte d’accueillir dans son corps une espèce de pilier d’énergie forte, comme des supports inconscients pour le monde, comme des porteurs de quelque chose qui les dépasse. Le message parlait clairement d’accueillir un pilier de lumière mais pas d’être ce pilier de lumière, la différence est pour moi importante au niveau de l’ego.  

Dans de nombreuses traditions, il est aussi dit que le chaman est celui qui est chargé de remettre de l’harmonie et de l’équilibre dans le monde en communiquant avec les différents esprits. Alors au-delà de techniques ou de rituels spécifiques, le chaman, de part son pilier de lumière, fait peut-être ce travail au-delà de lui-même et involontairement. On parle souvent de la charge chamanique et il est vrai qu’accueillir ce pilier peut être lourd au quotidien, mais en même temps, comment se confier et expliquer ce qui est ressenti ? Et quelqu’un peut-il vraiment comprendre, si ce n’est un autre porteur de pilier de lumière ? Peut-être que c’est aussi pour cela que l’on dit que les chamans se reconnaissent entre eux…

En plus d’être un porteur de lumière, le chaman a la capacité et surtout la porosité pour se laisser traverser par des champs d’informations. Toute l’information du monde est encodée dans l’énergie qui circule en permanence dans l’univers et le chaman à l’aide des états modifiés de conscience, se laisse traverser volontairement ou involontairement par ces champs d’énergie porteur d’informations. Alors si le chaman est porteur d’un pilier de lumière pour rééquilibrer les lignes de force du monde et a la capacité de naviguer dans les champs d’informations, quelle est la formation nécessaire pour assumer la charge chamanique ?

En venant d’une tribu, il était effectivement fondamental de connaître les traditions et rituels propres à son ethnie et les connaissances thérapeutiques transmises depuis de nombreuses années. Mais il était surtout nécessaire de développer une force intérieure et une sagesse pour dépasser son ego et assumer ce fameux rôle de chaman. Mais aujourd’hui, ces rituels et traditions venant d’une tribu qui n’est pas la nôtre sont-ils nécessaires ? Et si le plus important est de développer sa force intérieure et sa sagesse, est-ce vraiment les stages chamaniques qui peuvent apporter cela ?

Dans une tribu de l’Altaï, il est dit qu’il faut attendre l’âge de 43 ans avant d’être chaman, comme un apprentissage nécessaire de la vie, une expérience indispensable qui ne s’acquiert qu’au fil des années. La Vie serait donc la plus grande enseignante, accompagnée par les guides dans les voyages en états modifiés de conscience. Je pense aussi que tout le monde peut s’engager dans la voie chamanique du moment qu’il en ressent l’envie, le désir profond, que ce soit pour aider l’autre ou s’aider soi-même. Etre chaman c’est peut-être porter en plus quelque chose qui nous dépasse, ne pas être complètement maître de sa vie, la phrase clé d’une initiation de chaman étant : « je me mets au service des Esprits ».

Image Pixabay

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