Un tunnel avec des virages

Vous diriez à quelqu'un en deuil, "profite de ce moment pour trier tes papiers et te mettre à la broderie ?" Non, bien sûr.

‍

Le début du confinement a pu apporter une pause salutaire à beaucoup, voire des vacances non prévues. Mais plus il se prolonge, plus il devient difficile car il nous amène à vivre un deuil, le deuil de la vie d'avant. Dans cette crise majeure, la peur est là, l'avenir est incertain, des gens meurent, l'économie est en train de s'écrouler et pour certains les pertes vont être très importantes. Le monde d'avant n'est plus. Après le confinement, la vie ne va pas reprendre comme avant, le monde ne sera pas plus beau, en tout cas pas tout de suite. Oui c'est l'occasion de recréer un monde plus équitable mais entre la fin d'un monde et le début d'un autre, il y a le chaos, il y a le deuil de ce qui n'est plus.

‍

Chacun à sa façon traverse les étapes du deuil :

‍

*le déni : "c'est comme des vacances, la vie va reprendre comme avant"

‍

*la colère : " c'est de la faute du gouvernement, c'est de la faute de mon voisin qui continue de sortir"

‍

*le marchandage : "Et si on avait pris les choses avant, on n'en serait pas là, et si on avait fait comme les allemands"

‍

*le désespoir : "on ne va jamais s'en sortir, c'est horrible"

‍

*l'acceptation : "le monde d'avant ne sera plus, tout va être différent mais on va y arriver"

‍

Toutes ces étapes ne sont pas clairement définies, elles forment un processus, nous pouvons passer de l'une à l'autre selon les jours.Après tout cela, vient la reconstruction, le renouveau. Mais tout renouveau passe par une phase de chaos. Alors forcément l'avenir est flou. Nous sommes comme dans un tunnel avec des virages, nous ne voyons pas la sortie mais nous savons qu'elle existe quelque part. Et comme ce tunnel est sombre, il faut avancer à petits pas, jour après jour. Cela s'appelle la survie. Quand nous traversons les étapes du deuil, nous sommes tournés vers la survie, c'est pas à pas, jour après jour. Notre énergie, nos pensées sont tournées vers la mort, la peur de la mort. Il faut s'accrocher à la présence invisible de la lumière. Il y a une issue même si elle n'est pas encore visible, la lumière est là même si elle est cachée pour le moment. Quand nous avons accepté la mort, quand nous avons accepté la perte, nous quittons la survie. Alors à nouveau, il est possible de se tourner vers la Vie. Survivre, accepter la mort et alimenter à nouveau la Vie, c'est le processus du deuil. Et aujourd'hui nous avons tous des deuils à traverser, deuils de personnes décédés, deuils d'une entreprise, deuil d'une vie insouciante, deuil d'un ancien système...

‍

La Vie d'avant n'est plus, la nouvelle est à réinventer mais avant, il y a ce tunnel avec des virages.

‍

Le renouveau nait du chaos.

‍

Alors dans ce tunnel avec des virages, avancez à petits pas, faites des pauses, pleurez, faites ce que vous aimez, prenez soin de vous mais surtout souvenez-vous bien qu'il n'y a rien à réussir. Nous faisons ce que nous pouvons, chacun à notre rythme.

‍

Image Pixabay